Le but de ce post est d’apporter des informations sur un sujet généralement méconnu des collectionneurs, l’équipement de la cavalerie à partir de 1915, car peu traité dans les articles et ouvrages publiés sur le sujet. Cet équipement sera utilisé pendant toute la guerre, et bien au-delà, puisque la plupart des pièces qui le constituent serviront jusqu’en 1940. Il n’a malheureusement jamais été étudié à fond. Il est par exemple totalement absent des livres sur l’armée française parus chez Verlag sous les plumes de Stéphane Dekerle et Laurent Mirouze, qui constituent pourtant des références.
La tenue de la cavalerie, qui n’est plus adaptée aux nouvelles conditions de combat (le plus souvent à pied) de cette subdivision, est réformée par la Notice sur l’habillement, l’équipement, le campement, l’armement et le paquetage de la cavalerie en campagne du 5 juillet 1916, dont voici le préambule :
« Les nécessités de la guerre ont conduit à modifier l’habillement, l’équipement, le campement, l’armement et le paquetage de la Cavalerie. Le but de la présente notice est d’uniformiser et de codifier les mesures particulières prises par les différents corps depuis le début des hostilités.
Elle fixe :
Une tenue et un mode de paquetage identiques pour toutes les subdivisions d’armes (spahis exceptés).
Elle détermine :
La nomenclature des effets d’habillement, d’équipement, de campement et d’armement, l’outillage et les vivres du cavalier ;
Le harnachement du cheval ;
La répartition des divers effets sur l’homme et sur le cheval ;
L’habillement, l’équipement, le campement, l’armement, l’outillage et les vivres du cavalier du régiment de cavaliers à pied, et leur répartition sur l’homme et dans le havresac. »
Selon cette notice du 5 juillet 1916, et le mousqueton d’artillerie muni de sa baïonnette s’étant substitué à partir du 2 novembre 1914 à la carabine de cavalerie, l’équipement des cavaliers (ou grand équipement) est désormais constitué des effets suivants :
1 agrafe support ou courroie d’arrimage de mousqueton – Pour les hommes portant le mousqueton à la grenadière.
1 bretelle de mousqueton – Pour les hommes armés du mousqueton seulement.
3 cartouchières – Les hommes armés du revolver n’ont qu’une cartouchière.
1 ceinturon avec bélière, bretelles de suspension et porte-baïonnette – Pour tous les hommes, gradés compris. Le porte-baïonnette seul n’est pas distribué aux hommes armés du revolver.
1 dragonne – Pour les cavaliers armés du sabre.
1 étui et lanière de revolver – Pour les hommes armés du revolver. L’étui ne comporte pas de courroie, il est fixé au ceinturon comme une cartouchière.
1 gaine de fourreau de sabre – Pour les hommes armés du sabre seulement.
1 sacoche de maréchal des logis chef – Pour les maréchaux des logis chefs seulement.
1 trompette – Les trompettes emportent leur instrument muni de son cordon ou de sa lanière.
2 courroies de manteau avec chape.
Le brigadier-infirmier, les infirmiers et ordonnances des médecins ne reçoivent aucun effet de grand équipement, sauf un étui de revolver avec courroie et lanière et 2 courroies de manteau avec chape. Les cyclistes reçoivent, en outre, un havresac du modèle de l’homme des régiments de cavaliers à pied, un sac à dépêches et une courroie de sautoir en remplacement des courroies du manteau avec chape.
Quant aux cavaliers des régiments à pied, ils sont intégralement armés et équipés comme l’infanterie et ne sont donc pas concernés par cette étude, consacrée aux cavaliers demeurés montés.
Si la notice ne décrit pas l’équipement en lui-même, mais seulement sa composition, plusieurs publications au Bulletin officiel donnent des descriptions successives de chaque pièce qui le constitue :
Le ceinturon modèle 1903 de l’infanterie, confectionné en cuir fauve depuis le 9 décembre 1914, remplace l’ancien ceinturon spécifique, qui était plus étroit d’un centimètre.
Une nouvelle bélière, adaptable au ceinturon d’infanterie, est décrite au Bulletin officiel le 1er décembre 1916. Pouvant coulisser sur le ceinturon, elle forme un passant autour du ceinturon, retenu par un bouton double ordinaire. Les anciennes bélières sont modifiées en conséquence.
Les cartouchières en cuir fauve du modèle décrit le 14 juillet 1916, et les bretelles de suspension modèle 1892, également confectionnées en cuir fauve depuis le 9 décembre 1914 le complètent.
La baïonnette du mousqueton, qui dote désormais les cavaliers, est suspendue à un porte-baïonnette spécifique, distribué à la cavalerie dès le début de l’année 1915 et décrit au Bulletin officiel le 24 septembre 1915, sous la désignation de porte-épée de cavalerie.
Pour les hommes armés du revolver ou du pistolet automatique, portés dans un étui à l’avant droit, ils ne portent qu’une cartouchière à l’avant gauche ; un passant coulant, muni d’un triangle de suspension, décrit au Bulletin officiel le 1er décembre 1916, remplace la cartouchière dorsale.
Un étui de revolver de cavalerie (description au Bulletin officiel le 1er décembre 1916) est adopté. Il est identique au modèle classique, adopté en 1893 et modifié en 1909, mais ne comporte pas de dés de banderole. Le passant de ceinturon est surmonté d’un triangle de suspension identique à celui des cartouchières. Les étuis de modèle antérieur sont modifiés.
L’étui de pistolet automatique est quant à lui décrit au Bulletin officiel le 14 juillet 1916 et est destiné au PA de type Ruby.
La lanière de revolver ou de PA reste inchangée. Elle est d’un modèle unique pour toutes les armes de poing. Un anneau fendu la complètera lorsqu’elle est utilisée avec un pistolet automatique, Bulletin officiel du 25 mai 1917.
L’agrafe-support de carabine, dont le passant est trop étroit pour être enfilé sur le ceinturon d’infanterie, est remplacé par un nouveau mode d’attache du mousqueton, comprenant une courroie d’arrimage, décrite au Bulletin officiel le 24 septembre 1915, et un passant coulant glissant sur le ceinturon, qui ne sera décrit qu’un an plus tard, par la circulaire du 29 septembre 1916.
La plupart de ces équipements, qui seront toujours utilisés en 1940, sont relativement bien identifiés des collectionneurs, à l’exception du mystérieux dispositif d’attache du mousqueton, par courroie d’arrimage et passant coulant, totalement absent de toute la documentation que j’ai pu consulter jusqu’ici. Ayant par hasard découvert il y a quelques années un passant dans un lot de cuirs, et ne connaissant son utilité, j’ai finalement pu l’identifier, ce qui m’a donné l’idée de rassembler le maximum d’informations sur cette petite pièce d’équipement méconnue.
Voici la description complète publiée au Bulletin officiel le 1er décembre 1916 et la planche qui l’accompagne :
Le ceinturon de cavalerie est du même modèle que le ceinturon pour troupes à pied de toutes armes, complété ainsi qu’il suit :
La bélière est de même cuir que le ceinturon, mais d’une épaisseur de 2,5mm à 3mm ; elle est placée au ceinturon seulement lorsque le sabre doit être porté à pied.
L’une des extrémités est percée de deux boutonnières espacées de 140mm de tête en tête et réunies par un bouton double en tombac. Ces deux boutonnières forment une passe dans laquelle on engage le ceinturon lorsque la bélière doit y être adaptée.
L’autre extrémité se rattache à l’anneau du fourreau de sabre par deux boutonnières et un bouton double en tombac semblable à celui-ci-dessus indiqué, l’écart entre les deux boutonnières n’étant que de 70mm de tête en tête.
Lorsque le cavalier est armé du revolver, le ceinturon porte une seule cartouchière ; le ceinturon est alors muni d’un passant coulant en cuir de même nature que celui du ceinturon de 25mm de largeur et de 2 à 3mm d’épaisseur, à la partie supérieure duquel est cousu un triangle de suspension du même modèle que celui de la cartouchière 1916.
Ce triangle sert à fixer la bretelle de suspension par derrière. La bretelle de droite est fixée au triangle de suspension de l’étui de revolver.
Lorsque le cavalier est armé du mousqueton, le ceinturon porte trois cartouchières, le porte-épée de cavalerie et un passant coulant pour courroie d’arrimage de mousqueton.
Ce passant est en cuir fauve de 2,5mm à 3mm d’épaisseur et de 40mm de largeur ; il se compose d’un passant proprement dit et d’une enchapure avec dé en cuivre. Cette enchapure est cousue au milieu du passant avec une inclinaison de 45° sur la base du passant ; la couture est renforcée par un rivet traversant l’enchapure et le passant en leur milieu.
Le passant coulant se place au ceinturon de telle sorte que le D soit tourné vers le haut et l’autre extrémité de l’enchapure vers le bas.
Voici les dimensions de la bélière et du passant coulant pour courroie d’arrimage de mousqueton :
La courroie d’arrimage a fait l’objet d’une description un an plus tôt, le 24 septembre 1915, en même temps que le porte-baïonnette. L’ancien ceinturon de cavalerie, désormais démuni de sa bélière et du crochet de sabre, se porte maintenant de manière à ce que le dé en cuivre se trouve non plus sur la gauche, mais sur la droite, la courroie d’arrimage se fixa t à ce dé. Elle vient alors enserrer la poignée du mousqueton. 550 sont confectionnées par regiment.
Elle est en cuir fauve de 3mm à 4mm d’épaisseur avec boucle en fer étamé à rouleau de 23mm dans œuvre ; elle est munie de deux passants fixes, l’un placé en dessus près de la boucle, l’autre placé en dessous et joignant le premier.
La courroie est percée de trois trous d’ardillon distants entre eux de 25mm et dont le premier est à 60mm de l’extrémité du bout libre.
Longueur de la courroie, non compris la partie enchapée : 300mm
Largeur de la courroie : 22mm
Longueur de la partie enchapée : 50mm
Ce dispositif, qui ne donnera pas satisfaction, sera officiellement supprimé le 14 avril 1922, avec le rétablissement de l’ancienne agrafe-support de carabine, dont la largeur du passant est augmentée. Elle prend alors le nom d’agrafe-support de mousqueton.
J’espère avoir apporté quelques informations aux collectionneurs. J’invite ceux-ci à publier dans ce sujet des photos des équipements qu’ils pourraient eux-mêmes posséder ou des photos d’époque les montrant dans la réalité.