Bonjour,
Un grand merci à tous pour votre attention!
Après plus de deux semaines de marche et sans encore aucun baptême du feu, le LGR100 arrive dans la soirée du 21 août aux hameaux de Foy-Notre-Dame et Boisseille. Ces petites localités sont situées sur le plateau d´Herbuchenne, légèrement en retrait des falaises tombant à pic sur la rive droite de la Meuse, au dessus de
Dinant.
L´état major de la divison a déjà donné l´ordre à ce que le fleuve soit impérativement traversé le 23 août, si nécessaire de force...
La construction d´un pont sur bateaux-pontons doit se faire au sud du rocher Bayard, au lieu dénommé Les Rivages, aussi appelé "Penant" par la population locale. À ce but, le "Korps-Brücken-Train" de la division (pontonniers) commencent à entreposer plusieurs dizaines de ces grosses et lourdes barques en métal aux alentours du chateau d´Herbuchenne.
Dans la soirée du 22 août, le 100ème saxon se décide à envoyer une patrouille d´officier à cheval dans
Dinant pour sonder la situation. Ce sont le Leutnant von Seydewitz et l´Offizierstellvertreter Fischer de la MGK/100 qui pénètrent dans
Dinant par le sud (Anseremme et Penant), galoppent entre les pans du Rocher Bayard, arrivent sur la place du marché et font finalement demi-tour dans les faubourgs nord de
Dinant pour revenir sur le plateau d´Herbuchenne par le même chemin qu´ils avaient emprunté. Aucun incident n´eu lieu dans la ville sombre et fantomatique, aucun coup de feu, seul de temps à autre des lumières allumées furtivement dans certaines maisons pour être aussitôt de nouveau rapidement éteintes...
À 2 heures du matin, les chariots à munitions sont vidés et les cartouches réparties au sein des compagnies du LGR100. Sous l´ordre formel de ne pas parler ni fumer, les compagnies s´avancent lentement dans le brouillard matinal vers le hameau de Davisau. Les hommes attendent fébrilement plusieurs heures, allongés dans l´herbe humide. Lorsque le jour commence à poindre et que le brouillard se dissipe lentement, les premières balles perdues de la rive gauche commencent à susurrer dans l´air et les batteries des deux camps débutent leur duel d´artillerie.
Plus au nord, ce sont le JR178 et le JR103 ainsi que le FR108 et le JR182 qui attendent eux aussi de recevoir l´ordre de descendre dans
Dinant, les deux premières unités par la route des Fonds de Leffe, les deux secondes par la route de Ciney (route Saint-Jacques déjà éprouvée lors de cette fameuse reconnaissance en force ayant eu lieu un peu plus de 48 heures auparavant).
Le LGR100 doit lui, emprunter le chemin de la Montagne de la Croix, très raide, étroit et tortueux, qui descend en serpentin le long des terrasses vers le faubourg Saint Nicolas et la prison. Ce chemin est particulièrement visible des hauteurs de la rive gauche où sont retranchées quelques compagnies et sections de mitrailleuses francaises...
Le quatrième axe d´attaque, celui le plus au sud (route de Froidvau) qui aboutit à Les Rivages, ne sera emprunté par le GR101 qu´en fin d´après-midi, nous le verrons plus loin.
À 6 heures du matin, les troupes saxonnes commencent donc parallèlement leur descente massive sur
Dinant, suivant les 3 axes situés le plus au nord (carte ci-dessus). Si les crimes envers la population civile furent également commis dans les faubourgs de Leffe et de Saint-Jacques par les compagnies des JR103, 178, 182 et FR108, nous allons ici, par soucis de simplification, nous focusser essentiellement sur les événements s´étant produits dans les faubourgs Saint-Nicolas et Saint-Paul, ainsi qu´aux environs du Rocher Bayard et de les Rivages, car c´est dans cette zone que le LGR100 fit rage...
La 8ème Cie de Paul DREßLER sera la compagnie du 100ème saxon qui aura le plus de pertes à déplorer lors de cette journée, nous en verrons la cause plus loin. Avec 48 pertes (42 blessés et 6 morts), elle accumule presque´à elle seule la moitié de toutes les pertes du régiment pour cette journée (113 morts et blessés).
Le LGR100 commence donc sa descente tortueuse vers la Meuse en envoyant uniquement sa Leibkompagnie (1/100) qui atteint d´abord assez rapidement la rive droite mais est alors aussitôt la proie d´un feu nourri dès que les hommes se trouvent a découvert sur la place de Meuse ou dans certaines rues étant prises d´enfilade par les tirs francais de la rive gauche. L´historique du LGR100 maintient le fait qu´il était absolument impossible de déterminer l´origine des tirs et que ces derniers arrivaient de toutes les directions (vraisemblablement ce fameux "effet ricochet" trompeur contre les falaises, les murs et les toits des maisons). Il est même fait mention d´un système de souterrains et cavernes ramifié dans lequel les civils belges armés disparaissent après avoir fait feu, pour pouvoir ressurgir ailleurs peu de temps après.
La Leibkompanie est donc clouée dans le faubourg Saint-Nicolas et le chef du I/100, Graf Kielmannsegg décide de lui envoyer aussitôt les 3ème et 4ème Cies en renfort (la 2ème compagnie ne prendra pas du tout part au combat du 23 août, elle ne subit aucune perte). Ces deux compagnies sont aussitôt prises sous le feu francais, contrairement à la Leibkompanie, dès les premières secondes de sa descente sur le chemin escarpé, les Francais s´étant entre temps rendu compte qu´une attaque de grande envergure avait lieu à partir des hauteurs du plateau d´Herbutenne. Les saxons de ces deux compagnies de renfort ne perdent pas de temps à essayer à riposter, ils dévalent tant bien que mal la pente en empruntant également les nombreux jardins en terrasse et arrivent eux aussi dans les premières rues de la ville dans lesquelles ils sont à leur tour la proie d´un feu francais extrêmement nourri.
Persuadés que ce sont essentiellement des franc-tireurs belges qui leur tirent dessus de tous les côtés, les soldats commencent à enfoncer toutes les portes des maisons à coup de haches et de crosses. L´historique du LGR100 n´en dit pas plus et se borne à ce constat lapidaire.
La commission d´enquête belge est plus précise... Les Saxons du LGR100 commencent donc leur "épuration" de manière méthodique, persuadés que dans les maisons barricadées se réfugit un grand nombre de civils armés. Les habitants qui ne font pas signe apparent de résistance et qui gardent leur calme sont escortés vers la prison. Les habitants dont l´attitude ne plait pas aux soldats saxons ou qui paraissent trop excités ou nerveux, sont exécutés sur le seuil de leur porte ou dans leur demeure, peu importe l´âge et le sexe. C´est souvent le hasard et l´arbitraire qui décide des destins...Ainsi, certains notables et personalités de la ville sont épargnés car ils maîtrisent la langue de Goethe. Certains soldats allemands font plus preuve de pitié que d´autres quand ils apercoivent des enfants en bas-âge. Un soldat saxon de confession juive croit reconnaître une famille juive dans une habitation et pour en avoir le coeur net, oblige le père de famille à réciter une prière en hébreux, ce que ce dernier s´empresse de formuler, sans faute aucune. Le soldat saxon quitte alors la maison en soulignant le fait que les Juifs ne tuent pas d´autres juifs...Il inscrit ensuite à la craie sur la porte d´entrée en allemand: "Famille honorable, hors de tout soupcon"...
Certains civils paniqués qui sortent en courant de leurs maisons sont tués par les soldats en contrefort des falaises et qui sont encore en train de descendre en ville.
Sur la Place de Meuse, des civils sont forcés d´aller chercher les corps des soldats blessés et tués gisant sur les pavés. Certains tombent sous les balles francaises, les Francais n´arrivant pas encore à se faire une idée précise de la situation dramatique, tirant sur toute personne qui ose se mettre à découvert. En courant de journée, les Francais auront compris cette tactique honteuse et cesseront plus rapidement le feu quand ils verront des civils exposés.
Les corps des soldats blessés et tués sont entreposés provisoirement dans quelques habitations jouxtant la place ainsi que tout leur équipement. Dans les journées suivant les combats, des dizaines de soldats morts des suites leurs blessures et qui n´auront pas été soignés à temps ou parce que leur blessure avait été considérée comme trop grave, seront retrouvés dans des maisons épargnées par l´incendie. À côté d´eux, des masses d´équipements, d´armes et de matériel ramassé dans les rues. Ils avaient tous l´endroit de leur blessure mis à nu, comme si quelqu´un avait déjà commencé des premiers soins, mais sans succès. L´enquête allemande accusa les civils belges d´avoir froidement abattu ces blessés dans ces maisons, se servant aussi de ces dernières pour receller les armes et équipements glânés dans les rues et sur les places...
De même, des civils furent utilisés comme rempart vivant sur la Place d´Armes devant la prison pour que les troupes saxonnes puissent circuler impunément.
Le chaos était complet dans les ruelles du faubourg Saint-Nicolas, les Francais continuant à tirer sur tout ce qui bougeait. Hormis la prison, d´autre maisons servent à entasser les nombreux otages, dont la Maison Bouille avec ses écuries et sa forge.
Dès 6 heures 30, plusieurs habitations sont aussi placées sous l´égide de la Croix Rouge, entre autre la maison du Docteur Baivier (le docteur était en France) dans la Courte Rue Saint Roch, ainsi que dans l´ancienne forge Bouille et dans la maison de la veuve Hubin. Le Bataillonsarzt du II/LGR100, l´Oberarzt Dr Karl Theodor Hans Marx y installe ses postes de premiers soins et aussi bien les blessés allemands que des civils belges y sont soignés.
Vers 9 heures, les Allemands enfoncent la porte de la pharmacie Farage et pille tous les produits pharmaceutiques.
La "visite" des maisons se veut de plus en plus méthodique. Les Allemands progressent dans les rues en deux files parallèles, chaque file surveillant les maisons de l´autre côté de la rue. Chaque porte de maison est enfoncée et les vitres brisées, les habitants emmenés vers la prison ou exécutés froidement. Lustres, mobilier et vaisselle sont brisés, les denrées alimentaires et objets de valeur sont pillés. D´autre groupes de soldats suivent et jettent des bombes incendiaires dans les maisons pillées, épargnant les quelques maisons dont la porte arbore une inscription à la craie précisant "ne pas piller". Certains soldats et même des officiers menacent et injurent bon nombre de prisonniers en leur disant qu´ils seront exécutés sous peu.
Et pourtant, certains actes humanitaires ont lieu dans ce chaos. Un médecin allemand portant le brassard de la Croix Rouge s´arrête à chaque maison du chemin tortueux emprunté par les 3 compagnies du I/LGR100 et distribue du chocolat aux habitants encore chez eux. Des soldats saxons distribuent également du pain, des bonbons et autres sucreries aux otages dont ils ont la garde.
Vers 10 heures, le Dr Cassart, domicilié Rue Grande, au coin de la Rue des Fosses, ramasse des soldats allemands blessés dans les rues pour leur octroyer ensuite les premiers soins dans son cabinet.
Vers midi, les trois compagnies saxonnes du I/LGR100 n´osent pas aller plus loin que la prison et renoncent provisoirement à continuer leur avancée en direction du Rocher Bayard.
Pour augmenter encore le chaos indescriptible dans le faubourg Saint-Nicolas, voilà qu´en provenance de la route Saint Jacques (route de Ciney) déjà empruntée très tôt le matin par le FR108 et le JR182, les lourds attelages des pontonniers de la division tirés chacun par 4 ou 6 chevaux, chargés de leurs encombrants pontons métalliques et accompagnés par les pionniers de la 3/Pi12 essayent de se frayer un passage dans la rue étroite longeant l´arrière des murs d´enceinte de la prison. Eux aussi ont l´ordre de se rendre vers le Rocher Bayard et Les Rivages pour construire leur pont et sont obligés de rebrousser chemin, la route longeant la Meuse étant encore sous le tir direct des mitrailleuses francaises. Les attelages font donc demi-tour et remontent la rue Saint-Jacques en direction du plateau d´Herbutenne. Une trentaine de ces pontons sera alors transportée vers Les Rivages par ces mêmes attelages en fin d´après-midi, en empruntant cette fois la route de Froidvau qu´utilisera ensuite aussi le GR101. Six pontons métalliques seront cependant désattelés en fin de matinée à proximité du chateau d´Herbuchenne où cantonnent encore les II et III/LGR100. Ces pontons feront l´objet d´une mission aussi bizarre qu´insensée...
Vers midi, l´heure de la 8/100 de Paul DREßLER a sonné...L´Hauptmann von Montbé recoit l´ordre suivant: la 8ème cie et une section de la 7ème Cie doit se charger à dos d´homme ces 6 lourds bateaux-pontons métalliques et les transporter vers la Meuse en empruntant le chemin tortueux de la Montagne de la Croix déjà utilisé par les 3 compagnies du I/100 en cours de matinée...Cet ordre idiot fut très certainement donné suite à l´embouteillage causé par les attelages dans la rue de la prison. On décida donc de remplacer les chevaux par les hommes en espérant que cette solution soit plus productive...
Chemin de croix de la 8/LGR100 de Paul DREßLER lors de cette journée du 23.8.14:Chaque barque est portée par 40 hommes et dirigée par un officier ou un Offizierstellvertreter. Quelques éclaireurs de la 10/100 forment la tête de ce cortège insolite qui traverse d´abord quelques prairies. Le métal des barques brillant au soleil de midi attire rapidement les premiers tirs francais de la rive gauche. L´historique s´obstine une nouvelle fois à affirmer que les tirs proviennent également de nombreuses maisons bordant le chemin dans lesquelles sont encore embusqués des franc-tireurs. Les tirs proviennent soit-disant des fenêtres mais aussi des cheminées (!). Le premier ponton arrive tant bien que mal en ville et est déposé devant une auberge en flamme, les porteurs blessés étant immédiatement remplacés par les camarades valides escortant ce défilé tragi-comique.
Mais le deuxième bateau-ponton ne suit pas. L´Hauptmann von Montbé remonte lui-même la côte, accompagné par le musicien Richter et exorte ses hommes. Le second ponton arrive lui aussi en bas de la pente, suivi peu après par le troisième ponton conduit par le Leutnant Treusch von Buttlar. Ce dernier annonce que les porteurs des trois autres barques sont décimés par les tirs et n´ont plus la force de porter leur fardeau. Fähnrich von Feilitzsch, qui dirige un des pontons est également tombé sous les balles ennemies.
Hauptmann von Montbé ordonne aux Leutnante Mälzer et von Buttlar de l´accompagner, et à trois, ils recommencent l´ascension de la pente pour exorter leurs hommes. Sous une grêle de balles, les grenadiers parviennent à transporter le quatrième ponton jusqu´en ville. Devant la 5ème barque, le Fähnrich von Feilitzsch gît au sol, grièvement blessé. La plupart des porteurs sont eux aussi hors de combat. D´un effort commun, en traînant plus le ponton que le portant, le Leutnant Buttlar, le Vizefeldwebel Berndt, le hussard Bertram du HR20, le Grenadier Richter, les lieutenants von Rochow, von Ehrenthal et Mälzer, ainsi que le Vizefeldwebel Stumpf parviennent à le tirer jusqu´au bas de la pente. Le 6ème ponton est abandonné à son sort en haut du chemin...
Voici quelques vues actuelles de ce chemin étroit et tortueux emprunté par les compagnies du LGR100 lors de cette journée du 23.8.14. Il est aisé de voir qu´il est en grande partie à découvert et qu´il pouvait être parfaitement pris sous les feux des mitrailleuses francaises placées sur les hauteurs de la rive opposée...
L´historique du LGR100 poursuit sa narration en affirmant que le Leutnant von Buttlar et le hussard Bertram du HR20 sont blessés grièvement par une jeune fille qui leur tire dessus par le soupirail d´une cave...
Entre temps, le chef de la 8ème Cie, Hauptmann von Montbé, part à la recherche des compagnies du I/100 et la 4ème Cie est mise à sa disposition pour aider les restes des hommes de la 8/100 à transporter les 5 pontons et les escorter jusqu´au secteur situé entre le Rocher Bayard et le hameau de Les Rivages.
La commission d´enquête belge mentionne qu´à cette occasion, de nombreux civils belges furent placés en boucliers humains le long du rivage pour permettre cette fin d´opération.
Entre temps, le soleil a dépassé son zénith et le Kommandeur du LGR100, Oberst von der Decken, laisse également descendre le 3ème bataillon et la MGK par le même chemin arpenté. La troupe est elle aussi encore prise sous les balles, soit disant en provenance d´un long bâtiment rouge sur la rive gauche sur lequel flottent 4 drapeaux de la Croix rouge.
Peu après ordre est donné d´incendier toutes les maisons qui bordent le chemin emprunté par le LGR100 et desquelles les franc-tireurs belges ont tiré sur les soldats saxons. À cet effet, les dernières compagnies du LGR100 étant encore restées en réserve sur le plateau d´Herbuchenne (5ème, 6ème et 2/3 de la 7ème Cie) sont elles aussi mises en marche vers la ville pour parfaire l´opération de représailles contre la population civile.
Les troupes francaises de la rive gauche commencent lentement leur retraite et leur feu est de moins en moins nourri.
Les 5 pontons qui ont été transportés à sang et sueur d´hommes gisent maintenant sur le rivage, percés de part en part par de nombreux projectiles, pour le moment totalement inutilisables...Ils seront cependant réparés dans la nuit par les pionniers à l´aide de bouchons en liège.
Les nombreux blessés de la 8/100, dont Paul DREßLER gisent encore le long du chemin emprunté l´après-midi, entre d´autres camarades morts mais aussi de civils belges blessés ou exécutés, attendant d´être soignés et / ou transportés dans un des postes de la Croix Rouge du DR Marx (II/100). Leurs camarades réquisitionnent des échelles dans les fermes avoisinantes pour faciliter le transport des blessés mais aussi une grande quantité de foin pour leurs litières en bord de rues et de fossés. Le livre blanc allemand mentionne aussi qu´un poste de secours "mixte" fut aussi installé dans une maison du hameau de Les Rivages pour soigner soldats allemands et civils belges. En courant de soirée, lorsque les pontonniers auront terminé leur ouvrage, un Lazarett sera aussi installé sur la rive gauche de la Meuse, dans le faubourg de Neffe, dans le couvent provisoire des Soeurs Clarisses, au presbytère de Neffe. Ces dernières avaient émigré de Rennes suite aux lois anticléricales francaises du début du XXème siècle. Un médecin allemand aura la direction de ce Lazarett dans lequel seront aussi soignés des soldats francais du 208 RI.
Durant l´après-midi, le faubourg Saint-Nicolas est mis à feu et à sang.
Un incident se produisit dans la cour de la prison, visible du haut des falaises surplombant
Dinant. Des otages mais aussi des soldats allemands les escortant dans cette cour furent pris sous le feu des dernières compagnies du LGR100 descendant en ville, ces dernières croyant à un rassemblement de civils prêts à une émeute. Grâce à des drapeaux blancs agités frénétiquement, les Allemands cessèrent le feu.
En fin d´après-midi, environ 150 otages sont placés contre le mur de la propriété du Procureur du roi, M.Tschoffen. Un officier allemand (vraisemblablement le lieutenant colonel Kielmannsegg, chef du I/100) déclame une sentence en mauvais francais et accuse les futures victimes d´avoir tiré sur les troupes allemandes en abusant des symboles de la Croix Rouge. Trois rangées de soldats allemands sont placées en face des civils, deux à genoux et une debout. En tout environ 125 soldats participent au peloton d´exécution. Les civils blessés seront ensuite achevés méticuleusement....
Le vacarme de cette terrible fusillade provoque la panique aussi bien chez les otages dans les cellules de la prison que de leurs geôliers, ces derniers croyant à une contre attaque francaise. De ce fait, les prisonniers encore incarcérés sont libérés provisoirement, échappent à une seconde fusillade mais sont tout de même peu après acheminés vers Les Rivages servant de boucliers humains aux troupes saxonnes. S´ensuit alors une fouille pénible par quelques officiers lors de laquelle argent, bijoux, petits objets de valeur et pièces d´or seront confisqués. Plus de 400 de ces otages seront alors mis en marche par la route de Froidvau vers l´Allemagne où ils seront incarcérés dans la prison de Cassel.
Dans le courant de l´après-midi, vers 15 heures, la trentaine de pontons restante, encore montée sur leurs attelages, est acheminée du plateau d´Herbutenne vers Les Rivages en empruntant la route de Froidvau qui n´est pas très exposée aux tirs de la rive gauche, d´autant plus qu´une grande partie des compagnies francaises avait commencé à battre en retraite. Les pontonniers et les pionniers de la 3/Pi12, suivis par la totalité du GR101, se mettent rapidement au travail et la construction du pont avance à grand pas entre 16 et 18 heures. À l´arrivée de ces troupes à Les Rivages, ce secteur n´était encore occupé par aucun soldat allemand, les compagnies du LGR100 étant encore bloquées dans le faubourg Saint-Nicolas.
Par "mesure de sécurité", des civils sont là aussi pris en otage pendant que le pont est construit et que les premières compagnies du GR101 passent la Meuse à la barque.
Les quelques troupes francaises de la rive gauche, jusqu´à là encore tenues en échec par l´artillerie allemande, s´apercoivent que les Saxons avancent rapidement dans leurs travaux et prennent les pontonniers sous un feu concentré. Deux compagnies du GR101 (2ème et 11ème) ayant déjà pris pied sur la rive gauche prennent à leur tour sous leur feu les troupes francaises sur les hauteurs et sont même persuadées à leur tour qu´elle sont la proie de tirs provenant de maisons barricadées de la rive gauche.
En représailles, les hommes du GR101 fusillent 77 otages (vieillards et enfants) sur la rive droite, au pied du Mur Bourdon et commencent à incendier les maisons de Les Rivages.
Sur la rive gauche, les grenadiers du GR101 font la chasse aux civils dans les maisons bordant la rive et les épisodes ayant eu lieu sur la rive droite dans le faubourg occupé par le LGR100 se renouvellent mantenant au faubourg de Neffe.
Environ 40 civils s´étant réfugiés dans une conduite asséchée d´un aqueduc sont tués par jets de grenades.
Lorsque le soleil disparait derrière l´horizon, la majeure partie de
Dinant sur la rive droite et le faubourg de Neffe sur la rive gauche sont la proie des incendies. La ville qui comptait un peu plus de 1700 maisons avant l arrivée des Allemands, décomptera environ 880 maisons incendiées, environ 600 maisons à un degré de destruction plus ou moins grave et 250 habitations encore intactes.
Les compagnies du LGR100 atteignent le secteur du Rocher Bayard en fin d´après-midi, après l´arrivée du GR101, des pionniers et des pontonniers sur les bords de la Meuse à Les Rivages. Ils y bivouaqueront en attendant leur traversée de la Meuse dans les premières heures du 24 août 1914.
La photo ci-dessous, très intéressante, est extraite de l´historique du LGR100. On voit parfaitement, en fonction de l´éclairage des rochers par le soleil, que le cliché a été pris en fin d´après-midi, début de soirée. On peut y distinguer quelques officiers devant leurs hommes, le numéro "100" sur les couvre casques. Il semblerait que quelques soldats soient assis ou allongés sur l´extrême gauche de la photo, peut-être des blessés?
La seconde photo actuelle en dessous est bluffante, du fait que la structure du rocher ne semble pas du tout avoir subi d´érosion depuis plus de 100 ans.
Le LGR100 laissa sa 12ème Cie pour quelques jours à
Dinant, afin de garder les ponts sur le fleuve mais aussi pour assurer la sécurité des nombreux blessés encore soignés dans différents postes de secours. Le gros des troupes saxonnes quitta
Dinant pour toujours dans la matinée du 24.8.14.
Comment le casque de Paul DREßLER a t´il pu nous atteindre dans un aussi bel état de conservation? Nous ne le saurons vraisemblablement jamais.
A t´il été oublié dans un des postes de secours provisoires, une fois les derniers blessés graves évacués vers l´Allemagne? On peut facilement s´imaginer qu´un équipement important joncha encore quelques jours le sol de la ville, de ses recoins et de ses alentours.
Paul DREßLER a t´il été soigné par un médecin belge qui garda ensuite ce casque en souvenir, oublié ou perdu chez lui lors de ces journées chaotiques? Ou bien au couvent des Soeurs Clarisses au presbytère de Neffe? Un souvenir laissé en remerciement ou en souvenir à l´une des Soeurs?
Ou bien ce casque a t´il été découvert dans un fossé, une habitation délaissée, un jardin, une dépendance, par l´un des habitants faisant partie des quelques centaines de civils ayant regagné à la fin du mois d´aôut leurs maisons encore habitables, ou ayant tout simplement voulu récupérer encore quelques biens ou souvenirs de famille dans les décombres de leurs maisons?
Merci d´avoir eu la patience de me lire jusqu´au bout