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| Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. | |
| | Auteur | Message |
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Byng-boys
Nombre de messages : 3852 Age : 64 Localisation : Artesia Date d'inscription : 11/10/2010
| Sujet: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Ven 31 Déc 2021 - 12:29 | |
| Bonjour à tous, je vous présente un ensemble de trois photographies, certainement des retirages destinés aux vétérans du 97eme RIA. Le premier cliché est dédicacé (malheureusement peu visible) des mains du lieutenant Jacques Humbert. On l'aperçoit en premier plan, commandant la 1ere compagnie dans la tranchée de départ, en avant du Bois de Berthonval, le 9 mai 1915 à 9H37. J'avais déjà récupéré une reproduction de la photographie originale, il y a plusieurs années, directement de l'album où elle figurait. Extrait de l'historique du 97eme RIALe 9 mai, l'heure a sonné. Le soleil se lève radieux, le ciel est pur, un calme absolu règne sur la plaine. Soudain résonne un bruit de tonnerre qui augmente et qui ne cesse plus ; notre artillerie vient d'entrer en action ; il est 6 heures -- 75, 155, mortiers de 210 crachent sans arrêt, les obus passent avec un sifflement strident, ou avec un ronflement sonore au-dessus des têtes, vont exploser dans les tranchées adverses, et dans le ciel, les hommes regardent monter et descendre les torpilles de 58. -- Les coups se précipitent, les unités sont prêtes ; à 10 heures elles s'élancent avec le plus grand ordre et la plus belle ardeur. Les 1er et 2e bataillons du régiment sont en tête, rien ne peut arrêter leur élan. La première ligne allemande est atteinte, puis la deuxième, l'assaut continue toujours. L'ouvrage Oméga est enlevé par la 1ère compagnie qui pousse plus loin, pénètre dans le cimetière de Souchez ; les 3e et 4e sont aux lisières du village ; d'autres ont atteint le Cabaret Rouge, objectif assigné, devant elles, l'allemand est en dérouté, il fuit de toutes parts ; c'est la victoire et la trouée. Nos canons se sont tus, les réserves sont loin. Dans cet assaut d'une heure au cours duquel le 97 a enlevé plus de 3 km de terrain, les unités ont éprouvé bien des pertes, se sont fortement mélangées, la plupart des chefs sont tombés. Le bataillon de soutien, le 3e à combler les vides de la ligne d'attaque ; chacun, radieux mais épuisé par cette course et par la lutte, attend impatiemment les renforts pour entamer la poursuite. Les réserves sont loin, maintenant les balles sifflent, plus nombreuses, les obus tombent sur les assaillants. -- A droite le 159 violemment contre-attaqué reflue vers l'arrière et de la cote 119 qu'il vient de reconquérir l'allemand mitraille la plaine. Le cimetière de Souchez devient intenable sous les obus et ses défenseurs ce replient sur le Cabaret Rouge. Le lieutenant Humbert, le dernier dans ce coin, témoin de sa vaillance, tombe grièvement blessé.
Les deux clichés suivants ont été pris le 9 mai au cimetière de Souchez, le 97eme subira de lourdes pertes avant d'être obligé de décrocher, le village n'étant reconquis que 3 semaines plus tard.
Le soir arrive, l'allemand s'est ressaisi et se prépare à régir furieusement contre ceux qui l'ont si fort malmené et qui maintenant dans la nuit travaillent fiévreusement à organiser leurs conquêtes. Durant les jours suivants, les 10, 11, 12, incessant fut le bombardement par obus de tous et surtout de gros calibres, incessantes aussi furent les contre-attaques. A peine abrités dans des trous peu profonds et creusés à la hâte, les braves se maintiennent désespérément, malgré les pertes repoussent tous les assauts. Le sous-lieutenant Pelle, au Cabaret Rouge, debout revolver au poing est l'âme de la résistance ; les mitrailleuses de la 1ère CM, malgré le feu intense d'artillerie adverse qui s'acharne sur elles arrêtent toutes attaques venant de Givenchy. La chaleur est lourde, la fièvre mine les combattants sur ce plateau dénudé, pas une goutte d'eau pour rafraîchir les lèvres ; les ravitaillements n'arrivent pas. Des officiers, des hommes tombent, nombreux ; Sandrin, l'héroïque lieutenant se jette au-devant des grenadiers ennemis qui progressent par un boyau, quand une balle l'atteint au front. Le lieutenant Grimaut, mortellement frappé, sourit doucement à ses hommes et le soldat Derize ne veut pas, malgré d'atroces souffrances, laisser échapper un cri pour ne pas effrayer les Copains. Barbot, lui-même, l'héroïque soldat, celui qu'on avait toujours vu dans le danger, le 10 mai, tombait mortellement atteint, près des premières lignes. Que de Morts, que de souffrances et combien d'héroïsme ! Quelques jours après, quand le régiment, quittant le secteur qu'il avait conquis et conservé, défila devant le colonel, les survivants, amaigris, hâves, couverts de terre, les vêtements en lambeaux, marchaient tout de même avec une fière allure ; ils avaient au coeur le sentiment du devoir accompli. A peine reformé, le 97 remonta en ligne, le commandement espérant réussir plus complètement par la force, là où la surprise nous avait procuré, le 9 mai, un si brillant succès. Mais l'allemand était sur ses gardes, et à la puissance de notre artillerie, il opposa une contre-préparation au moins égal en intensité, supérieur certainement au point de vue des calibres employés. Les compagnies furent effroyablement écrasées dans les tranchées mêmes de départ, certaines perdirent plus de la moitié de leur effectif, mais tel était le sentiment du devoir, l'esprit d'abnégation de tous au 97, que les vagues d'assaut, si l'on peut appeler ainsi les groupes épars souvent sans chef, s'élancèrent le 16 juin à l'heure H dans la fournaise et dans la mort. Un cuisinier, Chapuis, voyant un de ces groupes, composée de bleuets de la classe 1915, hésiter, prit un fusil et s'élança à leur tête. Mais isolés, perdus dans la tourmente, renversés par les explosions et la fusillade, les assaillants sont cloués sur le sol. Le 1er bataillon est seul parvenu au cimetière de Souchez, il reste 3 jours et 3 nuits et l'abandonne enfin, n'ayant plus ni munitions, ni vivre, réduit à 3 officiers et 100 hommes environ.
Reproduction de la photographie originale qui possède une meilleure clarté.
Byng |
| | | PETIT DIABLOTIN
Nombre de messages : 2266 Age : 59 Localisation : ISERE Date d'inscription : 06/11/2016
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Ven 31 Déc 2021 - 13:00 | |
| re-Bonjour Byng, "Par Mille sabords" - comme ce serait exprimé un certain Capitaine - mais c'est Superbeeee ! Encore un superbe témoignage avec des photos incroyables. Merci beaucoup Byng Jean-Luc ...ou plutôt un p'tit café à cette heure-ci |
| | | cantal
Nombre de messages : 817 Localisation : auvergne Date d'inscription : 07/07/2009
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Ven 31 Déc 2021 - 13:39 | |
| Bonjour Comme d'habitude bien documenté Ces photos sont parues dans l'illustration non? Bravo Marc |
| | | Byng-boys
Nombre de messages : 3852 Age : 64 Localisation : Artesia Date d'inscription : 11/10/2010
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Ven 31 Déc 2021 - 15:50 | |
| - cantal a écrit:
Ces photos sont parues dans l'illustration non?
Il me semble que oui pour les photos du cimetière du Souchez, par contre la photo en gros-plan du lieutenant Humbert, je ne pense pas, il faudrait vérifier. Cela ne serait pas surprenant, dans la majeure partie des hebdomadaires de l'époque, un jury remettait des prix aux meilleurs clichés fournis par des photographes amateurs. Hormis le contexte historique et rare de ce genre d'images en 1915, la plus-value de ces documents, c'est que la photographie du lieutenant Humbert est dédicacée par lui-même. Byng |
| | | Byng-boys
Nombre de messages : 3852 Age : 64 Localisation : Artesia Date d'inscription : 11/10/2010
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Ven 31 Déc 2021 - 16:26 | |
| je rajoute à mon post cette édition du capitaine Humbert, "La Division Barbot", sortie en 1919. Je possède ce livre offert par mon grand-père, il y a maintenant 50 ans, il a été un facteur clé de mon grand intérêt pour l'histoire locale de la 1ere guerre depuis tout ce temps. Biographie de Jacques HumbertNé en 1893 à Paris, Jacques Emile Louis Léon Humbert est le fils du général d'armée Georges Louis Humbert. Il entre et sort major de la promotion Montmirail de Saint-Cyr en 1914 comme sous-lieutenant. Il combat durant la Première Guerre mondiale comme lieutenant au 97e régiment d'infanterie de Chambéry, notamment dans les Vosges et en Artois. En 1915, il est blessé, promu capitaine et décoré de la Légion d'honneur. Il est alors nommé comme élève à l'École d'état-major puis affecté jusqu'à la fin du conflit comme chef de bureau à l'état-major de la 77e division d'infanterie. Il est muté au Maroc en 1919, d'abord au 1er régiment de tirailleurs marocains, puis au 1er régiment étranger. Il est ensuite désigné pour suivre les cours de l'École de guerre. À partir de 1923, hormis un commandement au 7e bataillon de chasseurs alpins de 1930 à 1932, il est affecté exclusivement en état-major (6e corps d'armée, Conseil supérieur de la guerre, groupe d'armées du Nord). Au début de la Seconde guerre mondiale, il participe comme colonel à la bataille de Dunkerque en mai 1940. Évacué en Angleterre puis revenu en France, il est choisi par le général de Gaulle, alors sous-secrétaire d'État à la Guerre, comme chef de cabinet. Après l'armistice, il est nommé chef d'état-major de la 14e région militaire, puis commandant du 159e régiment d'infanterie alpine à Grenoble avant d'être désigné commandant militaire du département de l'Isère. En novembre 1942, il est nommé au grade de général de brigade et au poste de commandant supérieur de la Corse, la veille de l'invasion italienne de l'île. Il y organise la destruction des armements des troupes de l'armée d'armistice placées sous ses ordres. En mars 1943, il est mis en congé. Il rejoint le maquis du Vercors en 1944, puis est nommé par la Résistance gouverneur militaire de Grenoble. Il est ensuite incorporé dans la 1ère Armée en Alsace. De 1945 à 1949, il est le directeur du contrôle du désarmement militaire, industriel et scientifique de l'Allemagne. Il commande ensuite le groupement de montagne à Grenoble, appelé à reconstituer la 27e division d’infanterie alpine, puis est nommé commandant supérieur de la défense des Alpes. Il quitte le service actif en 1953. Devenu historien militaire dans les années 60, l'ancien général est l'auteur d'une trentaine d'ouvrages. Certains sont consacrés aux unités où il a servi, d'autres à des militaires célèbres (Bazaine, Raymond Duval, son père Georges Louis Humbert), d'autres encore à des opérations militaires conduites dans les Alpes du 16e siècle à la période contemporaine. Il est élu en 1965 à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie, devenant un membre titulaire effectif. Jacques Humbert meurt en juin 1993, ses obsèques ont lieu à Saint-Louis-des-Invalides. DistinctionsGrand officier de la Légion d'honneur Croix de guerre Croix de guerre des TOE Croix de guerre (Belgique) (Sources Wikipédia) Byng |
| | | p.lamy
Nombre de messages : 2159 Age : 62 Localisation : 57 Date d'inscription : 07/03/2008
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Ven 31 Déc 2021 - 17:50 | |
| Bonjour, Jolies images de ces combats bien illustrées par le texte de l'historique régimentaire. Les régiments d'infanterie alpine sont assez peu évoqués ici, ce sont des unités qui avaient aussi droit au port de la tarte, comme les RAM. Merci du partage. P. Lamy
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| | | Monte-au-Creneau
Nombre de messages : 61 Localisation : Aube Date d'inscription : 29/11/2016
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Dim 17 Juil 2022 - 10:49 | |
| - Byng-boys a écrit:
Les deux clichés suivants ont été pris le 9 mai au cimetière de Souchez, le 97eme subira de lourdes pertes avant d'être obligé de décrocher, le village n'étant reconquis que 3 semaines plus tard.
Byng Bonjour, Cet épisode de soldats français retranchés dans le cimetière communal de Souchez est -peut-être- à l'origine de la même scène dans le film "Les Croix de bois" (à confirmer ou bien est-ce un autre film ?) où on voit un soldat français qui finit par entrer dans une tombe éventrée pour échapper à la mitraille et à la canonnade. Qui donc a dit, en parlant des soldats morts laissés sur le champ de bataille, alors que les vivants sont sous terre dans des abris : " C'est le monde à l'envers : les vivants sont sous terre et les morts sont sur terre" Bien le bonjour. |
| | | quarentroeunpourtro
Nombre de messages : 3400 Age : 75 Localisation : Mediolanum près Nemetacum en Atrebatie Date d'inscription : 19/11/2012
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Dim 17 Juil 2022 - 12:12 | |
| Bonjour à tous,
Merci Robin, émouvant surtout que je suis dans le coin et passe souvent à l'emplacement du fameux "Cabaret rouge" de Souchez.
Pour Monte au créneau, j'ai eu la même pensée. C'est bien le film tiré du roman de Dorgelès "les croix de bois". La séquence où le sergent se fait tuer en allant chercher de l'eau pour sa section planquée dans les tombes explosées du cimetière..(de Souchez?)
44.000 Français à Lorette, 44.000 allemands à la Maison blanche de l'autre côté de la route, les 2 plus grosses nécropoles de la 1ère guerre... "Quelle connerie la guerre"! a dit je ne sais plus qui.
Bonne journée à l'ombre.
JP(quaren'tro)
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| | | Byng-boys
Nombre de messages : 3852 Age : 64 Localisation : Artesia Date d'inscription : 11/10/2010
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Dim 17 Juil 2022 - 17:11 | |
| - quarentroeunpourtro a écrit:
"Quelle connerie la guerre"! a dit je ne sais plus qui.
Jacques Prévert Cdt byng |
| | | PETIT DIABLOTIN
Nombre de messages : 2266 Age : 59 Localisation : ISERE Date d'inscription : 06/11/2016
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Dim 17 Juil 2022 - 18:09 | |
| Bonsoir Byng et à tous, Byng Merci beaucoup ! Pour avoir eu l'occasion de visiter la Nécropole à Lorette ... Mr Prévert avait bien raison Bonne soirée à tous Jean-luc |
| | | Monte-au-Creneau
Nombre de messages : 61 Localisation : Aube Date d'inscription : 29/11/2016
| Sujet: Re: Lieutenant Jacques Humbert, 97eme RIA, Souchez, mai 1915. Jeu 1 Sep 2022 - 18:54 | |
| - quarentroeunpourtro a écrit:
- ...
44.000 Français à Lorette,
... Bonjour, Au sujet de cette immense nécropole de N.D de Lorette, on n'a jamais pu dire exactement - combien de soldats étaient inhumés en terre (en séputures individuelles 1 stèle = 1 personne, ou collectives : 1 stèles = plusieurs personnes) - et combien étaient en ossuaires. Selon les sources, les chiffres diffèrent toujours. Je parle bien évidemment uniquement de ceux de 14/18 (outre ceux de 39/45 et autres conflits, moins nombreux bien sûr). Le site le plus étrange est wikipedia : il donne : - un nombre "rond" pour les tombes (individuelles et collectives) :20.000 . On n'a jamais compté ? - un nombre total de 44833 personnes. D'où la remarque : quels sont les vrais nombres ? - nombre de personnes inhumées en terre (en tombes individuelles et collectives). Et combien de stèles ? - ....".......".........".................."......"...ossuaires (8 ossuaires en tout). L'horreur de cette guerre, 1 siècle après, fait qu'on n'est toujours pas en mesure de dire combien de soldats sont inhumés et où ils sont inhumés. Il est vrai qu'on ne sait même pas combien sont morts ! Au revoir. NOTA : Généanet a photographié 19 486 stèles. ( https://www.geneanet.org/cimetieres/collection/2062-necropole-nationale-de-notre-dame-de-lorette ) : Les 20.000 citées ci-dessus ? Exemple de stèle collective : 1 stèle = plusieurs personnes : https://www.geneanet.org/cimetieres/view/3978759Corps d'un soldat de 14 indissociable du corps d'un soldat de 40 : https://www.geneanet.org/cimetieres/view/3978758 |
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