Les sticks et cravaches

Les sticks et cravaches

Une demande d’identification d’une cravache postée par un membre du forum m’a fait me replonger dans ma documentation concernant ce type d’accessoire et je me suis aperçu que j’étais beaucoup plus riche que je ne le croyais en documents officiels.
Je mettrai en ligne une partie de ceux-ci pour illustrer mon propos.

Il ressort de la lecture de cette documentation :

- Que la cravache est un accessoire de manège,
- qu’à ce titre, elle est règlementairement prévue dans le paquetage des écoles dont les élèves suivent des cours d’équitation, ainsi que dans celui des personnels, officiers et sous-officiers, dont la fonction est l’enseignement et la pratique de l’équitation, maitres de manège, écuyers…
- que les officiers de cavalerie peuvent en posséder, au même titre qu'il détiennent du harnachement de manège, mais, qu’en dehors des cas précités, elle ne fait pas partie de la tenue règlementaire et est même interdite…

En ce qui concerne les descriptions officielles, celles que j’ai pu retrouver ne concernent que les écoles. Essentiellement au nombre de deux, un modèle est attribué à l’Ecole du Service de Santé militaire et l’autre aux Ecoles militaires préparatoires.

Voici la description du 16 janvier 1889 concernant l’uniforme du personnel de l’Ecole du Service de Santé militaire :







J’avoue qu’il faut une bonne concentration pour se représenter cette cravache à partir de sa seule description…

Il semblerait que le Prytanée militaire ait adopté ce modèle de cravache. Voici ce qui est écrit dans la description de l’uniforme du Prytanée datée de 1904 :



La description de la cravache des écoles préparatoires est beaucoup plus sobre.
On la retrouve, reprise à l’identique, dans divers textes consacrés soit à l’école d’application de la cavalerie, soit aux écoles préparatoires de l’infanterie, de l’artillerie, du génie, du train, et de certains services…

Voici quelques exemples :

- 19 juillet 1886 :





- 16 mars 1887 :







Ce texte nous précise même le devenir de ces cravaches dont la fourniture incombe aux écoles :



- un autre texte, du 4 septembre 1887 :






On peut imaginer que cette cravache des écoles, en micocoulier, vraisemblablement produite du coté de Sorède, dans les Pyrénées orientales, ait pu ressembler à celle-ci (plus un stick qu’une cravache, dans le cas présent) :









Ce qui ne veut pas dire que l’exemplaire présenté ci-dessus soit un modèle règlementaire ! Je ne connais même pas sa provenance…
Le colonel J.L Salvador, dans les pages de son ouvrage, "La cavalerie de la Garde républicaine", dédiées à la cravache régimentaire (j'écris bien "régimentaire") du régiment de cavalerie de la Garde, évoque, au sujet du modèle destiné aux sous-officiers, la commune de Sorède et ses productions.
Je me souviens avoir visité une salle du Château de Collioure ou était reconstitué un atelier de confection de fouets en micocoulier...

Je poursuivrai, un peu plus tard, avec les officiers de cavalerie et l’extrême diversité des cravaches qu’ils arborent sur les photographies d’époque.
Je dispose de deux albums régimentaires de la première décennie du 20ème siècle dans lesquels puiser des illustrations en abondance…

Au 4ème RS, par exemple :



Je m’efforcerai de faire quelques agrandissements des possesseurs de cravaches.

D’un point de vue règlementaire, un point ressort, en ce qui concerne les officiers ; en dehors d’emplois, d’affectations et qualifications particuliers, la cravache ne fait pas partie de la tenue et est même, souvent, interdite.

A bientôt pour la suite consacrée aux officiers et à leurs sticks et cravaches...

Bon après midi,

Bonjour Bothrops atrox,
Toujours aussi passionnant et documenté, merci mille fois pour cette connaissance partagée.
Je me permets de mettre ci-dessous des photos d'une cravache d'officier personnalisée donc pas "réglementaire" et j'essayerai de retrouver une cravache que j'ai récupérée dans une famille dont l'aïeul était instructeur au cadre noir.
Cdt
Alain

Bonjour POMERLOT,

très belle cravache, en effet ! Même si d'achat personnel.

Je serais très intéressé par quelques photographies de la cravache du Cadre Noir que vous évoquez.
Elle devrait-être, me semble-t-il, en boyau noir, à 3 viroles dorées ?

Pour ma part, je vais entamer le paragraphe "officiers" de ce petit sujet...

Bonne journée,

bonjour à tous ,
Ah! le vaste sujet des cravaches, qui déborde bien entendu le strict sujet militaire du forum , mais qui touche celui de la mode équestre, puisque mis à part les quelques modèles strictement réglementaires (merci encore cher Bothrops, je n'en avait pas connaissance !), les officiers et sous-officiers achetaient cet accessoire selon leurs gouts et leurs moyens...
Vaste sujet donc.......
 Commençons donc par parler des sticks : le terme est anglais (mais je rechercherai dans mes catalogues de l'honorable maison Swaine, Adeney, Briggs and sons fabricant de fouets, cravaches , parapluies et autres objets de chasse , s'il a la même appellation en anglais), le stick donc est un morceau de bambou en général , plus rigide qu'une cravache , plus court aussi (pas plus de 60 cm en général), il est dépourvu de poignée ou de touche , le bambou étant totalement uni . C'est une mode venant d'Angleterre qui a du apparaitre dès le début de la Grande Guerre et qui s'est poursuivie dans l'armée française pendant tout le temps de la cavalerie à cheval ou à roulettes. Il y a une "manière" de porter le stick , et même de saluer en gardant le stick dans la main droite (mais.... "non licet omnibus adire Corinthum"!)
Je crois même que le port du stick a du être interdit à une certaine époque...

NB: Les photos des officiers dans les albums régimentaires montrent bien les diverses cravaches portées à l'époque

Il existe aussi des sticks qui n'ont pas l'apparence du bambou et qui sont entièrement recouverts de cuir (apparus vers 1940) ; j'en possède un qui est légèrement souple (certainement du caoutchouc durci avec une âme en acier) et qui constitue une remarquable ...matraque!

Exception qui confirme la règle, le stick que mon grand père portait vers 17-18 , dont le bambou était à une extrémité recouvert d'un "grip" constitué d'une lanière de cuir enroulée sur une quinzaine de centimètres , et qui à l'autre extrémité portait une touche de cuir redoublé sur une douzaine de centimètres ligaturée sur le bambou ; donc cravache-stick ou stick-cravache ....!!!


Sur les photographies tirées des albums régimentaires , on voit souvent des officiers portant une cravache rigide , et dont l'extrémité près de la main présente un "crochet" à angle droit; ce crochet est en bois de cerf , il est monté sur une virole métallique (argentée en général , unie et parfois guillochée ou striée, ou décorée en spirales) , et la "cravache" est en jonc verni; elle comporte à son autre extrémité une touche plus longue que sur une cravache "normale", cette touche est doublée et est en général en buffle : il s'agit d'un FOUET de CHASSE (ou de vénerie) , qui , à la chasse est porté avec une flotte en cuir tressé (à l'époque un cuir blanc "genre" buffle) attachée justement à la touche doublée de l'extrémité du fouet  et de plus de 1m , 1,5 m de longueur.

merci bothrops atrox pour ce nouveau travail de recherches dans les textes officiels!
a+

Bonsoir,
bonsoir killer2lamor,

de rien, c'est toujours avec plaisir que j'effectue ces recherches que je souhaite instructives et en dehors des sentiers battus.

Les textes officiels dédiés aux officiers de cavalerie font très rarement référence à la cravache.
Lorsque cet accessoire est mentionné, c’est, le plus souvent, pour en rappeler l’interdiction, sauf pour les personnels dont la fonction en justifie le port.

Voici qui résume bien, je pense, cette situation :









Poursuivons par quelques agrandissements des photographies des albums régimentaires en ma possession :











On voit, ici, un stick (?) avec une poignée en bois de cerf, me semble-t-il.
J’ai rendu anonyme le médecin par égard envers d’éventuels descendants, compte tenu d’une remarque du colonel Salvador, à la page 200 de son ouvrage consacré au régiment de cavalerie de la Garde républicaine, que je mentionnerai en toute fin…  







On voit, effectivement de tout !
Mais , dans les bras du cavalier assis sur le sol, j’avoue avoir quelque difficulté à identifier ce qu’il « berce »… ? Une version indigène de la cravache ? Un auxiliaire pédagogique ?  

On pourrait retenir bien d’autres photographies, mais je vais terminer sur l’observation du colonel Salvador, page 200 de son très agréable ouvrage.
Je le cite :

« Un des avantages du port de la cravache est de ne pouvoir mettre ses mains dans les poches, puisque les élèves gardes apprennent au centre d’instruction « qu’une main dans les poches, cela fait décontracté ; deux mains, cela fait branleur » .. »

Voici donc l’explication de ce personnage rendu anonyme !
Mais que les gens de l’arme ne se réjouissent pas trop tôt et ne se moquent pas trop du service de santé…
J’ai, aussi, débusqué un officier de cavalerie, sur un autre album, pour venir égaliser le score à un « branleur » partout    :



Bonne soirée,

PS : si le chien apparait "flouté", ce n'est absolument pas intentionnel ! Et puis, il n'a pas les pattes dans les poches  !

Bonsoir,
voici un sujet que j'affectionne particulièrement !
Pour illustrer, voici quelques uns de mes effets du Cadre Noir :
- képi, cravache et gants d'un adjudant maître de manège


- chapeau de manège "lampion", gants Saumur Buscarlet et cravache d'un écuyer (officier)



Ces cravaches sont gainées de cuir noir cousu à plat, et ont trois viroles en laiton doré. Elles sont traditionnellement remises aux sous-maîtres, maîtres et écuyers (les appellations ont changé de nos jours) par l'Ecuyer en chef.
Un accessoire magnifique ! on se sent meilleur cavalier rien qu'en les tenant .... mais mon cheval n'en croit rien ! le bougre...

Salut à tous,

Vaste sujet que celui des cravaches et thème de collection très "large".

magnifique cette cravache du Cadre Noir de Saumur dont l'usage - le port à titre professionnel devrais-je dire - est strictement interdit pour ceux qui n'en sont ps officiellement récipiendaire.

Voici un cliché de celles en ma possession dont je pense que seule, celle qui est au milieu, peut avoir été portée par un officier.



Celle qui est tout en bas est en cuir rouge et pourrait avoir servi dans les Troupes d'Afrique.

Bonjour,

quelques photographies supplémentaires concernant la cravache dite "Perpignan", apparemment très répandue chez les sous-officiers de spahis et les cavaliers de l'armée d'Afrique :







En ce qui concerne ce cavalier, j'hésite entre un sous-officier de spahis et un sous-officier d'une compagnie de remonte :





Il semble coiffé d'une chéchia à trois bandes ?

Les photographies des deux derniers personnages sont des années 1930.


Et un dragon :