Au matin du 21 novembre 1917, en moins de 10 heures, les 381 Mark IV du Tank Corps britannique ont enfoncé la ligne Hindenburg sur une largeur de douze kilomètres et réalisèrent une percée de plus de neuf kilomètres. Erich von Ludendorff revint en hâte au GQG allemand afin de préparer les instructions d'urgence et envisageant même une retraite générale. Le 30 novembre survint une contre-attaque allemande qui renversa la situation mais le Tank Corps venait tout de même de prouver que les chars étaient capables de réaliser des exploits.
La bataille de Cambrai dura 11 jours et introduit une nouvelle manière de faire la guerre, avec de nouvelles armes et d'autres règles.
Dans la nuit du 19 au 20 novembres, les tanks quittent un par un leur zone d'attente pour rejoindre leur position de départ à environ 1 km de la ligne Hindenburg. Le camouflage du bruit des moteurs a été géré avec des tirs de mitrailleuses et de mortier. des officiers guident les chars jusqu'à leur position.
Suivant les directives émises par Fuller, la coopération avec l'infanterie a été répétée du 5 au 14 novembre dans des camps d'entraînement.
Sans faire de trop gros rassemblements, les chefs de section lisent à leurs hommes l'ordre spécial numéro 6 du général Elles. Des fils de fer positionnés guident les chars vers la ligne Hindenburg.
Les tanks se mettent en route et dépassent les dernières positions tenues par l'infanterie, à l'intérieur des monstres de fer les équipages boivent un dernier verre de rhum. L'un des char, légèrement en avant, embarque le général Elles et le drapeau du Tank Corps. Les engins avancent et l'artillerie déclenche son tir de barrage...
A l'aube du 20 novembre 1917, à 6h20 les chars franchissent le no man's land.
Chaque section de trois tanks Mark IV se déploie en triangle : un tank de tête devant et les deux autres décalés à 100 mètres derrière. L'infanterie sort des tranchées au même moment où l'artillerie ouvre le feu sur les positions allemandes, augmentant d'avantage l'obscurité par l'emloi de fumigène. Les Allemands sont totalement surpris. Les chars de tête atteignent rapidement la première ligne allemande et arrivent sur les avant-postes faiblement tenus. Appuyés par un barrage roulant d'artillerie, les tanks progressent de façon irrésistible, les tirs d'artillerie aveuglent les observatoires allemands qui ne peuvent utiliser leurs canons.
De plus les aéronefs du Royal Flying Corps lancent des bombes sur les objectifs préalablement reconnus et les avions mitraillent les batteries d'artillerie allemande et les poches de résistance. Les chasseurs, plus haut dans le ciel, empêchent les chasseurs allemands de survoler les lignes britanniques.
Chaque jour du mois de novembre, des avions équipés d'appareil photographiques avaient survolé les lignes allemandes ce qui a permis, au prix de lourdes pertes du côté des pilotes, de réaliser des cartes tres précises sur le dispositif allemands et ses pièges : triple réseau de tranchées, position de rechange des barreries, nids de mitrailleuses, bretelles permettant l'arrivée des réserves, zones de camouflage etc.
Le champ de bataille est en mouvement perpétuel, les liaisons sont coupées autant du côté allemand que du côté anglais, les chars s'orientent en fonction de leur objectif donné, les défenseurs allemands sont déboussolés.
De tous côtés, le tandem char-infanterie avance sans relâche et en quelques minutes, le plus grand obstacle, la ligne Hindenburg, est rompue.
Les dernières poches de résistance sont réduites en milieu d'après-midi.
La côté de Flesquières est l'un des objectifs les plus importants, située au centre de l'attaque. S'y collent les Ecossais de la 51st Infantry Division commandés par le général Harper. Cette ligne de crêtes commande l'accès à Cambrai et offre une vue sur l'ensemble de la zone des combats.
l'assaut est dirigé par des éléments des bataillons de tanks D et E, ils sont suivis par les 152nd et 153rd Infantry Brigade. Les tanks sont immédiatement pris à partie à courte distance par l'artillerie allemande et très vite les carcasses fumantes des tanks commencent à joncher le terrain. L'ordre de repli est donné dans l'urgence. L'infanterie essaie à son tour, sans les chars, de coiffer l'objectif...mais cela tourne en bain de sang. Néanmoins, en fin d'après-midi, quelques tanks parviennent à entrer dans la partie Ouest du village mais sans liaison avec l'infanterie...les équipages des chars doivent lutter seuls face aux fantassins allemands qui restent cachés dans les caves lorsque les chars patrouillent et attendent l'arrivée de l'infanterie écossaise pour les prendre à partie à courte distance. A la tombée de la nuit, Flesquières tient toujours.
Dans la partie Ouest du dispositif, les 51st Infantry Division et 62nd Infantry Division sont à la tombée de la nuit dans le village d'Anneux situé à trois km au Nord de Flesquières (qui reste un îlot de résistance allemande). Les 6th, 20th et 12nd Infantry Division se sont emparés du bois Lateau, Masnières et Marcoing (où la passerelle est trop endommagée pour être utilisée)
Le Tank Corps a donc littéralement transpercé le front puis, grâce à l'infanterie, réduit les défenseurs de la ligne Hindenburg en les prenant de flanc ou de dos.
La deuxième partie du plan Haig peut maintenant débuter afin d'isoler Cambrai, la cavalry entre en scene mais les chevaux ont du mal a franchir les réseaux de fil de fer écrasés par les Mark IV. L'action des 1st, 2nd et 5th Cavalry Division est presque négligeable. Deux escadrons de cavalerie parviennent à se faufiler sur le canal de l'Escaut en passant à Masnières sur un pont de fortune et à Marcoing sur le pont-rail. Mais ils sont accueillis à 16 heures les mitrailleuses Maxim de deux bataillons de la 107. Infanterie Division qui vient d'arriver dans le village de Cantaing.
A la tombée de la nuit, le combat cesse presque partout. L'heure de la cavalerie est passé...
Les pertes allemandes sont élevées avec 139 officiers, 7316 hommes, environ 100 canons et une grande quantité de mitrailleuses. Coté britannique, elles sont inférieures de moitié.
Parmi les 371 tanks engagés, 179 ont été mis hors de combat dont 49 par l'artillerie allemande et 16 suite aux assauts de l'infanterie allemande. Plus de 70 machines ont été abandonnées suite à des pannes mécaniques.
Le tank Corps enregistre la mort d'une grosse centaine d'officiers et de 530 membres d'équipage.
C'est une victoire britannique, que sonnent les cloches de Londres, mais en réalité la 3rd Army est exténuée et n'a pas de réserve pour exploiter le succès initial.
Au matin du 21 novembre, il n'y a plus d'effet de surprise et et les renforts allemands affluent en gare de Cambrai allant jusqu'a trois divisions par jour.
Dès lors une guerre d'usure s'installe entre le 22 et le 29 novembre.
La contre-attaque allemande estv planifiée pour le 30 novembre ayant pour nom de code "Déluge". Elle est déclenchée au moment même où les Anglais préparent une attaque pour s'emparer du massif de Bourlon.
La contre-attaque allemande doit être menée par les trois groupes d'Armées, ceux d'Arras, Caudry et Bussigny : attaquer et étrangler la poche percée et tenue par les Anglais devant Cambrai et cette contre-attaque a connu un grand succès. Pour la seule journée du 30 novembre les Anglais reconnaissent avoir perdu 6000 hommes et beaucoup de matériel et les Allemands regagnent une partie du terrain perdu.
Au final les deux armées considèrent avoir eut leur victoire, c'est en réalité un match nul mais les Britanniques savent désormais l'importance que peut avoir l'arme blindée, alors que les Allemands la sous-estiment.
Au total
pertes allemandes : 41 000 hommes
pertes britanniques: 44 000 hommes
Source : La Bataille de Cambrai, Novembre 1917, le Tank Corps perce les lignes allemandes, par le capitaine olivier Entraygues.
article paru dans le magazine numéro 5 de Batailles et Blindés, sept-oct. 2004je vous conseille de vous procurer et de lire cet article en entier tres interessant, car je n'ai pas tout décrit ici (entrainement, témoignages, plan Haig 2e partie, riposte allemande et le plan etc)
a+, Rom