Sous "Les Zinzin", souvenir du front, 79eme RI.

Bonjour à tous, je vous présente une photo-carte prise probablement au printemps 1915 en Artois, même si celle-ci est postdatée du mois d'octobre. Elle met en scène un groupe de poilus appartenant au 79eme RI où doit figurer le propriétaire de cette carte, le soldat Léon Rapysaille. Le poilu au centre, arbore une capote simplifiée 3eme type (2 poches de poitrine). L'autre homme qui pause à l'extrême droite du cliché, porte une capote du 2eme type (suppression de la poche extérieure de poitrine gauche, article du 2 novembre 1914). Les écussons de capotes sont de multiples variantes, en passant par les modèles à fond "jonquille" (retenu le 11 novembre 1914) aux modèles à fond garance à forme rectangulaire, voire les chiffres en drap découpés et cousus directement.  La majorité est coiffée de képis bleus simplifiés modèle 14 (premier type), car ils paraissent bien creusés et évasés. Enfin on distingue les pantalons de toile en coton bleu, genre "ouvrier mécanicien" qui rétrécissent rapidement après plusieurs lavages, peut-être la raison concernant la tenue du poilu appuyé sur sa hache, le haut du pantalon déboutonné...






Extrait de l'historique du 79eme RI (offensive de mai 1915, secteur de Neuville St Vaast).

A la fin d'avril, le régiment descend au nord d'Arras ; il doit prendre part à l'offensive de la 10e
Armée. Le 9 mai ! Quelle clarté autour de cette date dans nos souvenirs ! Vous vous rappelez ce
paysage : la route de Béthune à Arras, large, plantée de grands arbres touffus coupait obliquement
les tranchées que nous tenions à l'ouest. Plus haut, sur la route, à la crête, devant la 2e
compagnie, le
fortin allemand de la « Maison Blanche ». Les tranchées et boyaux traversaient une végétation de
printemps. Les blés retombaient le long des parois. Des moissonneuses étaient encore dans les
champs. Il restait, en particulier à « Madagascar » où l'on allait par un boyau interminable le long
de la route, de riches meules de paille qui nous permettaient un peu de confort dans nos abris.
Pendant les premiers jours de mai, on creusait des boyaux dans la craie. La nuit, on amenait du
matériel. Nous vîmes alors les premiers crapouillots. Nous entassions dans des niches des grosses et
des petites bombes, apportées sur nos épaules. L'attaque fixée au 8 fut retardée ; ce retard nous
permit de vêtir sur place nos premières capotes bleu horizon.
Le 9 mai, le temps, pluvieux les jours précédents, s'est levé. A l'heure H, vous sautez dans la plaine.
Mais déjà vous ne pouvez plus suivre le commandant de VISSEC qui, avec un bâton, mène l'assaut
avec ses grandes jambes de cavalier ; et très loin en avant vous perdez de vue le pantalon rouge du
commandant CLAUDOT. Quelques minutes la « Maison Blanche » tient bon devant notre
première vague ; elle est enlevée dans un nouvel effort. Quel élan ce jour-là, et quelle confiance
dans la Victoire ! Douai vous était promis pour le soir : vous courriez sur Douai en lignes
régulières de tirailleurs, comme à la manœuvre. Vous vous arrêtâtes, essoufflés, devant le moulin
[i]de Thélus. On voyait les ennemis déséquipés, s'enfuir dans les herbes, tout près, au-delà de
Thélus, sur la crête de Vimy. Chacun regarde de tous côtés : à gauche, on se bat à l'issue nord de
Neuville-Saint-Vaast ; à droite, dans le « Labyrinthe », personne ; derrière, personne. Quelle
rage ! « Nous avons fait trop vite, les renforts ne suivent pas, les Allemands vont pouvoir se
reprendre ! »
Et en effet, le lendemain, dès midi, le bombardement commence. I.e « Chemin Creux », le boyau
de la Vistule sont intenables. Mais où est-on à l'abri ? Le boyau de l'Elbe et le petit poste qui se
tapit sur la route d'Écurie derrière une pile de sacs à terre sont écrasés par les crapouillots et
arrosés par les pétroleurs ennemis. Au cimetière de Nettyille, le commandant FAURE a établi son
poste de commandement dans le « Caveau de la Vieille Fille ». L'ennemi tâte nos unités de
première ligne les unes après les autres ;et le soir de la Pentecôte, à six heures, c'est le grand jeu.
Plusieurs fois les vagues ennemies sont brisées devant le moulin. Des tirailleurs qui se glissent dans
les hautes herbes sont tués à bout portant. Le château de Nenville est en feu.
Le 26, relève. On se retrouve aux « tas blancs », aux « pylônes », à Mareuil, et le général
BALFOURIER cite le régiment à l'ordre du corps d'armée.
Après quelques jours de repos autour d'Aubigny, Izel-les-Hameaux, Hermaville, Hautes-Avesnes, nous remontons en ligne.









Byng

Bonjour Robin

Superbe témoignage de cette année 1915, l'année terrible.
Ce coin m'est familier comme à toi.
La Maison blanche où reposent maintenant environ 44.000 soldats Allemands..en face des environ 44.000 Français de N.D. de Lorette. Match nul..    
On parle du moulin de Thélus....Le fameux Moulin Barthas? redécouvert et préservé il y peu.
Par contre où situer le cimetière de "Nettyville"? Ce doit être celui de "Neuville" St Vaast sans doute.

J'apprécie.

Bonne journée  

JP(quaren'tro)

quarentroeunpourtro a écrit:

Par contre où situer le cimetière de "Nettyville"? Ce doit être celui de "Neuville" St Vaast sans doute.

Bonjour JP, merci beaucoup pour tes appréciations. Je pense qu'il faut effectivement lire cimetière de Neuville, il s'agit d'une "coquille" originale imprimée dans l'historique.

"Keep safe"


Byng

Bonsoir Robin,
Merci beaucoup pour ce nouveau post qui comme pour tous les autres sont passionnant à lire.

Merci aussi JP pour ton intervention .

Cordialement à vous deux.
Jean-luc

Bonjour à tous, je rajoute à ce post une autre photo-carte d'un groupe d'hommes du 79eme. Le cliché a certainement été effectué en Artois au printemps 1915. On notera (comme sur le premier cliché déjà présenté) les numéros de cols et de képis cousus directement sur le tissus. On distingue également, la présence de pattes-rouleaux du modèle GDFB.












Byng

Bonjour, merci pour ce partage et bravo pour le temps passé à la recherche d'informations et la rédaction de cet article.

Daneck

Bonjour à tous
Merci Robin pour cette évocation du 79è.
On en parle aussi dans ce petit livre des éditions Ysec (Je précise que je n'ai pas d'actions..)
Pour les amateurs de l'histoire du fameux "Labyrinthe"! dont on ne découvre plus grand chose. Sauf peut être le monument de l'aspirant Lauregans dans le chemin creux entre Écurie et Neuville St Vaast...

Bonne journée à tous  

JP(quaren'tro).